samedi 25 février 2012

Page 2 (Prisca)

[Compilation des épisodes de la semaine, formant la page 2 du texte de Prisca]

Un quart d'heure environ s'écoula avant qu'elle ne réussisse à se relever complètement. Elle s'apprêtait à retourner sur les bords de la rivière quand elle vit qqch parterre près de l'escalier. Des traces de pas. Des empreintes qui venaient du premier étage et qui se dirigeaient vers le salon. Elle suivit le chemin emprunté par ces pieds inconnus et se vit menée à la porte dérobée du bureau. Très bien. C'en était trop, elle décida de se rendre au commissariat. Allait-il falloir qu'elle soit habile tout de même, car elle avait elle-même des choses à cacher. Mais elle ne se sentait désormais plus en sécurité, il fallait qu'elle fasse quelque chose. Qui de mieux que les représentants de la loi pour assurer sa protection ? Ce ne serait certainement pas à son électricien de frère, membre permanent de la fédération officielle des abonnés absents, qu'elle pouvait envisager de demander secours. Ni à sa comptable de sœur, dont la vie ressemblait a s'y méprendre à un monastère en plein hiver. Et elle n'avait pas d'autre famille. Quelques amis, certes, mais de toute manière il fallait qu'elle reste discrète. Et paradoxalement il lui semblait beaucoup plus simple de dissimuler l'essentiel à la police qu'à ses proches. Elle pris son sac et se mit en direction du commissariat. Ce n'était pas très loin, dans les petits villages comme celui-ci, les forces de l'ordre siègent toujours au cœur de la petite cité. Ce qui parfois peut-être un vrai problème, mais en l'occurrence cela l'arrangeait bien. Dans les grandes villes, la maison de la loi réside souvent au rez-de-chaussée d'un immeuble en béton de cinq étages. Ici, on venait demander secours dans une maisonnette qui ressemble à une école primaire un lendemain de kermesse. Il y avait même des ampoules multicolores et des fleurs en plastique qui ornaient l'entrée. Fallait-il y voir un manque de crédibilité certain ? Leurs investigations étaient-elles à la hauteur malgré tout ? Autant de questions que tout le village se posait régulièrement.
Assise sur un banc à côté du radiateur, elle patienta environ une heure. Non pas que le commissariat fut bondé ou que les policiers furent débordés, bien au contraire…mais personne n’était encore venu prendre sa déposition. Finalement, un jeune homme l’invita enfin à passer dans son bureau. Il était fort aimable mais ne semblait pas dans une forme olympique. Son visage, comme aimanté par le sol, se décrochait à mesure qu’il faisait un pas devant l’autre. Cécile lui raconta en détail l’épisode du pont, ce qu’elle eut le temps de voir, son éveil chez elle, les traces de pas…elle n’oublia aucun détail, et mentionna même la lampe qu’elle avait sur elle et qui avait disparue à son réveil, les pétales de fleurs qu’elle trouva dans sa poche, la canne de son grand-père sans laquelle elle n’aurait jamais pu se relever, et même le miaulement d’un chat qui l’a fit sursauter quand elle se « baladait » sur les berges juste avant que l’homme masqué ne fasse son apparition. Elle lui raconta absolument tout - tout, sauf l’essentiel évidemment.
- « Très bien, je vous remercie mademoiselle Cerbiloni. Vous nous avez donné beaucoup de détails et c’est très important pour le bon déroulement de l’enquête. Néanmoins, il va falloir que je me déplace chez vous pour débuter mon investigation »
- « Je vous en prie, allons-y, monsieur… »- « Lieutenant Tilmann. Mais appelez-moi Marc »Cécile hésita un instant.- « Euh...oui, merci, Marc. Je vous y conduis »Ils sortirent du commissariat par la porte arrière qui donnait sur le parking. Cécile savait qu’elle jouait un jeu dangereux. Elle avait à la fois besoin d’aide pour comprendre ce qu’il se tramait autour d’elle et à la fois excessivement peur de se faire démasquer dans le même temps. Comme si au bord du gouffre elle réclamait désespérément un filet mais qu'il fallait impérativement qu'elle passe entre les mailles ! Décidément, la schizophrénie la guettait pour de bon. Elle repensait à cet homme masqué. Qui pouvait-il bien être ? Comment diable était-ce possible que quelqu'un d'autre eu connaissance de la valisette ?Ils arrivèrent en moins de 5mn à La Hutte. Cécile se demandait d'ailleurs quel était l'intérêt de faire ce trajet en voiture. Elle comprit quand elle vu Marc sortir une mallette de son coffre. À l'intérieur, il y avait des instruments de types médicaux. Elle regardait pas mal de séries policières à la télé, elle savait que ces ustensiles bizarres servaient à "récolter des indices". Intéressant. Pourtant, tout en l'observant faire, elle ressenti peu à peu un picotement traverser sa colonne vertébrale. Pour la première fois, elle sentait la peur l’envahir. Elle eut envie d’attraper et de serrer la main de Marc. Mais il fallait qu’elle se ressaisisse. Elle prit donc une profonde inspiration et se mit à repenser à Arc-en-ciel voyages et à tous ces fruits et ces insectes exotiques qu'elles allaient découvrir en Nouvelle-Calédonie quand tout cela serait fini.- « Les traces de pas ne sont pas toutes semblables, je dirais que deux personnes sont venues ici » lança Marc en beau milieu de son inspection.
Cécile abandonna l’espace d’un instant ses précieux insectes calédoniens :- « Ah oui ? »- « Vous ne savez vraiment pas qui a pu s’introduire chez vous ? Ni ce qu’ils cherchaient ? »L’étau de la justice se resserrait sur Cécile. Le sujet devenait brulant. Fallait-il qu’elle mentionne une partie de l’histoire pour aider au mieux l’enquête ou devait-elle feindre de ne rien savoir ?- « Je n’en ai vraiment aucune idée, Marc »- « Ok. »Marc ne semblait pas convaincu, mais il n’aurait su dire pourquoi.- « Je vais repasser au commissariat afin de déposer les prélèvements au labo puis j’irai faire un tour à la rivière. Il va falloir que vous veniez avec moi également »- « Oui très bien, je vous suis »- « Si le moindre détail vous revient il conviendrait de m’en faire part au plus tôt, Cécile. Je compte sur vous »Cécile sentait bien que Marc commençait à avoir de sérieux doutes quant à sa version édulcorée des faits. Et cela la déstabilisait de plus en plus.Ils quittèrent La Hutte et prirent la direction du commissariat.Le tonnerre grondait, un violent orage se préparait. La journée avait été terriblement longue et elle était loin d’être terminée. Cécile avait hâte de pouvoir retrouver les bras de Morphée et s’évader à nouveau vers sa destination favorite. Elle allait finir par tout connaître de la faune et la flore calédonienne avant même d’y avoir mis les pieds.
Après un bref arrêt au commissariat, Marc gara la voiture sur le pont et l’invita à lui montrer le chemin pour atteindre le lieu de l’agression. Cécile se sentait très fébrile. L’idée de se retrouver à cet endroit avec un représentant de la loi, qu’elle avait conduit elle-même ici de surcroît, la tétanisait.Elle marchait d'un pas lent et hésitant, comme si elle cherchait à retarder le plus possible leur arrivée sur les lieux. Marc suivait docilement quand il s'arrêta brusquement. Cécile se retourna :-" Marc ?"Il était agenouillé dans l'herbe.- "Il y a des cendres ici, et du bois brulé. Les traces d'un feu"Cécile sentit son cœur se décrocher de sa poitrine.- "...Ah bon ? C'est étrange..."Elle bégayait presque. Marc marmonna à son tour :- "Mmmm...C'est très bizarre. Nous ne sommes pas dans un endroit fréquenté par les gens. Les bordures de la rivière sont à peine praticables par ici. Qui donc a pu faire un feu à cet endroit...et surtout pourquoi..."Cécile n'en revenait pas qu'il puisse être aussi suspicieux. Elle avait pourtant prises toutes les précautions nécessaires. Marc se retourna et s'approcha de l'extrême bord de la rivière.- "Et il y a des poissons morts ici !"Cécile n'osait même plus répondre. Une question, il fallait qu'elle trouve rapidement une question pertinente à lui poser afin de détourner son attention.


(à suivre)

Prisca

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